ET POPULAIRE
ECOLE NORMALE SUPERIEURE DES LETTRES ET SCIENCES HUMAINES – BOUZAREA FORMATION A DISTANCE DES PROFESSEURS D’ENSEIGNEMENT FONDAMENTAL
PROFIL
: PROFESSEURS DE FRANÇAIS
MODULE
: GRAMMAIRE CORRECTIVE
NIVEAU :
3ème ANNEE ENVOI N° 1
Document réalisé par D. ATTATFA Maître de conférences ENS / LSH – BOUZAREA ANNEE UNIVERSITAIRE : 2022 – 2022
1. Objectifs du module :
Ce module vise à faire acquérir aux enseignants une quadruple compétence :
– repérer les erreurs dans les productions des élèves ;
– les classer en fonction de leur nature ; – en expliquer la cause ; – les corriger. 2. Programme du module :
Partie théorique :
(envoi n° 1)
– L’aspect incontournable et positif de l’erreur – La distinction erreur / faute – La notion d’interlangue – Les différentes approches de l’erreur – Les différentes grilles de classement des erreurs – L’origine des erreurs
Partie pratique :
(envois n° 2 et 3)
Analyse de productions d’élèves – inventaire des erreurs – interprétation des erreurs – rappels des règles transgressées – correction des erreurs 2 ENVOI N° 1
3 1. Statut de l’erreur :
L’erreur a longtemps été considérée comme éminemment négative, dans la mesure où l’on pensait qu’elle constituait un obstacle à l’apprentissage de la langue. Il y avait une obsession de la faute et on considérait qu’il fallait lui faire une chasse impitoyable. Mais, avec le développement des études en didactique, les choses ont évolué. Enseignants et chercheurs sont maintenant d’accord sur deux points :
– l’erreur est incontournable dans 4 en place un programme axé sur des besoins précis et urgents.
2. Erreur et norme :
Pour classer une forme linguistique comme erreur, il faut d’abord avoir défini la norme que l’on prend en considération : langue standard ou langue familière par exemple.
On peut distinguer grosso modo la "norme", qui correspond à ce que l’on "doit" dire, et "l’usage", qui correspond à ce que la plupart des gens disent. Mais une sociolinguiste, Marie-Louise MOREAU1, affine davantage cette opposition et distingue cinq types de normes : – les normes de fonctionnement qui concernent M. L. Moreau, (dir.), Sociolinguistique : concepts de base, Mardaga, Liège, 1997.
5 valeurs aux formes linguistiques ; c’est ainsi que l’on distingue des formes belles, élégantes, par opposition à d’autres jugées familières, relâchées ou vulgaires ;
– les normes fantasmées, résultant d’une conception de "la norme comme un ensemble abstrait et inaccessible" hors de portée des utilisateurs et par rapport auquel tout le monde serait en défaut. Cette classification permet à l’enseignant de se situer lorsqu’il évalue une production d’élève. Exemple : quand l’élève écrit "Je vais au coiffeur", il se réfère à la norme de fonctionnement ; quand l’enseignant le corrige et propose "Je vais chez le coiffeur", il se réfère à la norme prescriptive.
3. La distinction erreur / faute
Beaucoup d’enseignants parlent indistinctement
de faute et d’erreur. En didactique des langues, on fait cependant la différence entre les deux termes : – on dit qu’il y a erreur lorsque l’élève se
trompe parce qu’il n’a pas les moyens de se corriger, n’ayant pas encore étudié la notion en question ; 6 copie, on ne doit pas le sanctionner sur ce qu’il n’est pas censé savoir mais uniquement sur ce qu’il a effectivement étudié.
4. L’interlangue :
Ce terme est apparu en 1972 sous la plume de
Selinker et il a été repris par la suite sous diverses appellations : système approximatif, système intermédiaire, système transitoire, dialecte idiosyncrasique, grammaire intériorisée, langue de l’apprenant, etc. Les recherches faites dans ce domaine ont permis de cerner les principaux traits des interlangues : – aspect systématique, c’est-à-dire que la même erreur apparaît toujours de la même façon dans des contextes identiques ; – aspect instable, c’est-à-dire que le système évolue constamment : des erreurs disparaissent tandis que d’autres apparaissent et l’élève se rapproche progressivement de la maîtrise du système de la langue étudiée ; – perméabilité, c’est-à-dire passage constant de la langue étrangère et à la langue maternelle et inversement ; – phénomènes de simplification ou au contraire de complexification des règles de la langue étrangère ; – phénomènes de régression, c’est-à-dire qu’une erreur qui avait disparu à un moment donné peut réapparaître par la suite ; 7 – phénomène de fossilisation, c’est-à-dire qu’une
erreur peut persister pendant très longtemps et devenir très difficile, sinon impossible à corriger.
5. Les différentes approches de l’erreur :
Différents courants se sont succédé dans ce
domaine : – L’analyse contrastive : Elle a prévalu dans la période 1950 – 1970. Basée sur les travaux de la linguistique structurale et distributionnelle (Bloomfield), elle fait aussi appel à une théorie psychologique, celle du behaviorisme (Skinner). Elle travaille sur le concept de transfert de la langue 1 (langue maternelle) à la langue 2 (langue étrangère), qui peut être positif ou négatif. Ce qui est proche ou sem****le est facile à apprendre ; ce qui est différent donnera lieu à un transfert négatif et donc à des erreurs, c’est la théorie des interférences. Intervenant a priori, elle travaille sur la comparaison de la L1 et de la L2 pour déterminer les difficultés que les apprenants risquent de rencontrer. On ne part donc pas des erreurs commises, on essaie plutôt de les prévoir et d’agir de manière à les faire éviter. Il se pose cependant un problème, à savoir que les erreurs commises ne sont pas toujours celles qui étaient prévues. 8 Charles-Pierre BOUTON2 écit à ce sujet :
"On
ne parvient à créer, avec la langue seconde, un second comportement verbal spontané qu’en construisant, à partir d’un système d’habitudes acquis avec la langue maternelle, un nouveau système aussi complexe et conforme aux contraintes spécifiques de cette langue seconde." L’apprentissage est considéré ici comme un
conditionnement. Ce courant, représenté essentiellement par des chercheurs comme Fries, Lado, Py et Noyau, postule que la langue 1 doit absolument être évacuée de l’apprentissage et qu’il n’y faut faire aucune référence, ni pour traduire des notions difficiles à expliquer ni même pour donner des consignes. La théorie des interférences a été développée par Francis DEBYSER en 1971, qui la définit selon trois points de vue : – un point de vue psychologique : elle est considérée comme une contamination des comportements verbaux ; – un point de vue linguistique : c’est le résultat d’un accident de bilinguisme dû au contact des langues (langue maternelle et langue étrangère) ; – un point de vue pédagogique : c’est un type particulier d’erreur dû à la structure de la langue maternelle. De nombreux travaux ont utilisé cette théorie pour élaborer des manuels basés sur la comparaison 2 C.–P. Bouton, L’acquisition d’une langue étrangère, Paris, Klincksieck, 1074.
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